« Sanko, le rêve de Dieu », en compétition officielle pour l’Étalon d’or de Yennenga, est l’œuvre des co-réalisateurs maliens Mariam Kamissoko et Fousseny Maïga. Ce long métrage de 117 minutes, projeté dans la soirée du vendredi 28 février 2025 lors de la 29ᵉ édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO), aborde avec force et sensibilité la question de la tolérance religieuse dans les communautés africaines.
Le Sahel est confronté à une crise sécuritaire depuis plus d’une décennie, où l’intolérance religieuse alimente les conflits. Sanko, le rêve de Dieu s’inscrit dans ce contexte et met en scène un village en proie à une crise suite au décès de son imam. La guerre de succession entre trois prétendants, aux profils radicalement différents, plonge la communauté dans une lutte ouverte pour le pouvoir religieux. Chacun revendique l’héritage spirituel du défunt imam, avec des arguments solides, créant un climat de tensions qui met à rude épreuve la cohésion sociale et les principes mêmes de l’islam.
Le film s’attarde sur les dérives humaines face au pouvoir et à l’héritage, mettant en lumière la cupidité, la corruption et les manipulations religieuses. Il illustre également la quête de savoir et la nécessité de distinguer les véritables préceptes de la foi des interprétations biaisées qui servent des intérêts personnels.
Une réalisation originale
L’une des grandes forces de « Sanko, le rêve de Dieu » réside dans la qualité de sa mise en scène. Les réalisateurs ont su tirer parti des décors naturels du Sahel, offrant un cadre visuel authentique et immersif qui renforce la puissance dramatique du récit. Le choix des comédiens, issus du Mali apporte une diversité et une justesse d’interprétation remarquables, rendant les personnages profondément humains et crédibles.
Le montage, quant à lui, est fortement maîtrisé, alternant séquences de tension et moments plus introspectifs, ce qui maintient le spectateur en haleine tout au long du film. La photographie sublime les paysages arides et les scènes de confrontation morale, accentuant la gravité des enjeux.
Un ancrage régional peu commun
« Sanko, le rêve de Dieu » véhicule un message universel sur la tolérance et les dérives du pouvoir religieux, mais son ancrage exclusivement sahélien peut limiter son impact au-delà de cet espace. En inscrivant l’histoire dans un cadre géographique et culturel très spécifique, les réalisateurs risquent de restreindre la portée du film auprès d’un public plus large, qui pourrait avoir du mal à s’identifier pleinement aux enjeux locaux. Une approche plus universelle dans la mise en contexte aurait pu renforcer l’universalité du propos.
Malgré cette limite, « Sanko, le rêve de Dieu » demeure une œuvre originale, qui interroge avec justesse les rapports entre foi, pouvoir et société. L’angle du traitement cinématographique précis et le scénario bien construit font de ce film un sérieux prétendant à l’Étalon d’or de Yennenga.
Par Issa Sidwayan TIENDREBEOGO